Bombardements au Rojava

Une réponse aux attaques de l’armée turque – Interview avec Zagros Hîwa

Oct 6, 2023A la une, Actualités

Suite à une vague d’attaques lancées par la Turquie le 5 octobre 2023, Zagros Hîwa, porte-parole du Comité des relations extérieures de l’Union des communautés du Kurdistan (KCK) répond aux questions d’Annuschka Eckhardt.
Traduit et édité depuis la version anglaise de Riseup4Rojava. L’article original provient de Junge Welt.

L’attentat perpétré dimanche devant le ministère turc de l’intérieur et revendiqué par le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) en a surpris plus d’un, car les attentats suicides n’étaient plus une tactique courante du PKK depuis un certain temps. Pourquoi le PKK a-t-il utilisé cette tactique ?

Selon moi, il ne s’agit pas d’attentats suicides, mais d’actions auto-sacrificielles dans le cadre de l’autodéfense face aux attaques génocidaires de l’armée turque contre le peuple kurde en Turquie, en Irak et en Syrie. L’État turc mène une campagne de guerre psychologique : “Nous avons éliminé le PKK en Turquie, il ne reste plus présents qu’en Irak et en Syrie”. Les camarades ont rappelé aux dirigeants fascistes que le PKK existe également là où il s’est organisé pour la première fois et que les Kurdes peuvent se défendre à l’endroit même où les attaques contre eux sont planifiées.

Deux policiers ont été blessés lors de l’attaque, mais personne n’a été tué à l’exception des assaillants. Quel était, selon vous, l’objectif de cette action ?

L’action était une réponse aux attaques de l’armée turque contre le peuple kurde. L’armée turque utilise des armes chimiques contre les combattants de la liberté depuis trois ans. Les prisonniers politiques sont torturés et tués dans les prisons turques. L’UE, les États-Unis et les institutions internationales gardent un silence assourdissant sur ces graves violations des droits de l’homme.

Dans la déclaration de responsabilité, il est dit que l’attaque était destinée à servir d’avertissement. Que demande le PKK pour éviter d’autres actions de ce type ?

Les attaques chimiques et l’utilisation d’armes interdites contre nos positions doivent cesser. L’armée turque doit se retirer des lieux qu’elle a annexés dans le nord de l’Irak. Abdullah Öcalan est en isolement total depuis plus de 31 mois, sans contact avec le monde extérieur. Personne n’a pu lui parler pendant cette période, tant ses avocats que sa famille.

Le PKK est interdit en Allemagne depuis 30 ans. Pensez-vous qu’une action comme celle d’Ankara pourrait encourager des interdictions dans d’autres pays ?

L’interdiction du PKK par les pays européens, en particulier l’Allemagne, n’a aucune base légale et légitime. La seule raison est d’obtenir de nouvelles concessions économiques et politiques de la part de la Turquie aux dépens des Kurdes. Le PKK n’a rien fait contre les pays européens et leurs populations, et son interdiction a joué un rôle très négatif dans l’escalade du conflit. Si les pays européens n’avaient pas interdit le PKK, l’État turc n’aurait pas poursuivi une politique entièrement militaire contre les Kurdes. J’invite les pays européens à envoyer une délégation dans le nord de l’Irak pour déterminer dans quelle mesure la Turquie viole le droit international en utilisant des armes chimiques et d’autres armes interdites. Ce n’est qu’à ce moment-là qu’ils pourront décider à juste titre qui bannir.

L’État turc a réagi à cette action en attaquant le sud du Kurdistan et en procédant à de nombreuses arrestations de Kurdes en Turquie. Les grands médias allemands s’inquiètent d’une “spirale de la violence”. Que leur répondriez-vous ?

Si les grands médias s’inquiètent de la “spirale de la violence”, ils devraient remonter aux racines du conflit et avoir une perspective historique, et pas seulement actuelle, sur la question kurde. S’ils le font, ils découvriront que la politique turque de génocide contre les Kurdes, en particulier au cours des 100 dernières années, est la principale cause de la violence, non seulement en Turquie, mais aussi dans l’ensemble du Moyen-Orient. Ces médias devraient également enquêter sur le rôle des pays européens dans la création de la question kurde par le biais du traité de Lausanne et donc de la récente “spirale de la violence”. S’ils le font, ils découvriront certainement qu’elle doit être redéfinie comme des “crimes de guerre commis par la Turquie contre les Kurdes”. Tant qu’ils interdisent le PKK et criminalisent les Kurdes, les Etats européens se rendent complices de ces crimes.